A quelques heures du réveillon de Noël, le Covid-19 joue cette année encore les trouble-fête. Alors que le variant Omicron semble fulgurant, le nombre record de contaminations qui doublent désormais tous les trois jours, poussent le gouvernement à accélérer sa riposte. Emmanuel Macron tiendra lundi après-midi un conseil de défense sanitaire consacré au Covid-19, juste avant le Conseil des ministres qui doit adopter le projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal, a annoncé vendredi l'Elysée à l'AFP.
Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait indiqué mercredi qu'une "réévaluation de la situation sanitaire" était prévue à cette date, alors que l'arrivée du variant Omicron affole les chiffres de contamination partout en Europe. Jeudi, le seuil des 90.000 cas quotidiens a été franchi en France, avec 91.608 cas confirmés. Le précédent record, 86.852 cas, remontait à début novembre 2020, au pic de la deuxième vague.
Avant de retrouver leurs proches pour Noël, les Français se sont testés en masse ces derniers jours. Repartie en trombe depuis plusieurs semaines, l'épidémie a désormais pris le visage du variant Omicron. Le gouvernement prévoit qu'il devienne majoritaire dans le pays d'ici peu, entre Noël et le Jour de l'an. Si plusieurs études montrent que l'efficacité des vaccins est nettement réduite avec seulement deux doses face à ce variant, une dose de rappel permettrait de relever le niveau de protection.
La Haute autorité de santé (HAS) a ainsi recommandé vendredi que la dose de rappel puisse être réalisée à partir de trois mois pour la population éligible. En attendant d'examiner cet avis, le ministère de la Santé a annoncé dans la foulée que le délai serait ramené à 4 mois dès maintenant et non à partir du 3 janvier comme initialement prévu. Jusque-là, il était de 5 mois après la précédente injection.
Avec ce passage à 4 mois, 40 millions de personnes sont éligibles dès aujourd'hui à leur dose de rappel, dont 22 millions l'ont déjà faite, a précisé le ministère. Dans son avis, la Haute autorité de santé recommande par ailleurs dès à présent l'administration d'une dose de rappel chez les 12-17 ans souffrant d'immunodéficience ou d'une comorbidité à risque de forme grave.
Si pour le moment Omicron n'entraîne pas de vagues d'hospitalisations, ses répercussions potentielles inquiètent, étant donné son extrême contagiosité. "Le scénario réaliste, c'est que mi-janvier on sera à 200.000 contaminations jour", a estimé vendredi sur CNews l'infectiologue Benjamin Davido.
Avec le risque, évoqué jeudi par le Conseil scientifique, d'une paralysie de la société à cause d'une multiplication des arrêts de travail et de l'"absentéisme". "Il va falloir qu'on réfléchisse à un plan de secours" pour l'hôpital, a notamment souligné Benjamin Davido. Faudra-t-il supprimer la notion de "cas contact", raccourcir la durée de l'isolement, voire abandonner les tests ? Ces questions vont se poser rapidement face à un variant qui se répand comme une traînée de poudre.
Le ministre de la Santé Olivier Véran a indiqué jeudi que le gouvernement veillerait à "éviter tout phénomène de paralysie dans le pays ». "Si vous mettez en éviction (tous les cas positifs et les cas contacts) dans le système scolaire, la police, l'hôpital, (la société) va être à l'arrêt", a prévenu vendredi Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Tenon sur BFMTV.
En attendant, le projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal sera examiné en commission à l'Assemblée nationale mercredi et doit entrer en vigueur le 15 janvier. Ce texte a suscité inquiétudes et critiques sur les réseaux sociaux, en particulier à propos d'une disposition sur un possible "cumul des justificatifs". L'intention n'est absolument pas d'exiger un pass vaccinal plus un test pour aller prendre un café, ont voulu rassurer vendredi une source ministérielle à l'AFP et la présidente LREM de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet. Il n'y a pour l'heure pas de piste particulière concernant des lieux éventuellement concernés. Un test PCR ou antigénique négatif de moins de 24h sera en revanche obligatoire dès mardi pour tous les passagers, vaccinés ou non, se rendant dans les territoires français d'outre-mer à partir de métropole comme de l'étranger, a annoncé vendredi le ministère des Outre-mer. La rumeur enfle aussi à propos d'un possible couvre-feu après 20h00 pour freiner la circulation du virus, en complément d'un recours accru au télétravail.
Les arrêts de travail à cause d'Omicron, risquent d'être le prochain cauchemar économique après celui de la première vague. L'inquiétude grandit quant à une potentielle désorganisation généralisée face à la déferlante de contaminations attendue en janvier. La liste est longue des secteurs risquant de subir les absences au travail liées aux "centaines de milliers" de cas par jour redoutés en début d'année, selon Olivier Guérin, membre du Conseil scientifique français, citant "la distribution alimentaire, la sécurité, l'énergie, les transports, les communications, et la santé".
Le président de l'institution, Jean-François Delfraissy, a de son côté soulevé la "désorganisation possible d'un certain nombre de services essentiels ». Encore minoritaire dans l'Hexagone, le variant Omicron n'a pas causé d'isolements forcés massifs en raison de cas positifs ou de cas contacts. Mais quelques signaux d'alerte s'affichent et les projecteurs sont braqués sur la sixième vague en janvier.
Sur le rail, la SNCF constate auprès de l'AFP des perturbations marginales dans les trains régionaux mais pas d'impact sur les grandes lignes. La RATP ne ressent "pas d'inquiétude pour l'instant", et la Poste affirme ne pas avoir rencontré de problème. Côté aérien, là où la compagnie scandinave SAS a dû annuler des dizaines de vols mardi et mercredi en raison de l'absence de salariés malades et que Lufthansa subit le même problème sur ses long-courriers sans confirmer que le variant est en cause, Air France ne voit pas pour l'instant de pilotes ou de personnel naviguant malades au point de forcer à des annulations.
Dans l'artisanat et les petites entreprises du bâtiment, un secteur déjà touché par des pénuries de personnel, "les cas contacts et les cas positifs font que l'on perd de la main-d'oeuvre en plus et il va devenir compliqué de fournir autant d'activité", s'est inquiété vendredi le président de leur Confédération (Capeb), Jean-Christophe Repon, sur France Info. Le gouvernement tente d'être rassurant, le ministre de la Santé, Olivier Véran, affirmant qu'"il y a des cellules d'anticipation à tous les niveaux (...) de manière à permettre au pays de tourner", dans les domaines du sanitaire, de l'éducation, des transports, et de l'économie."Nous devons éviter tout phénomène de paralysie dans le pays", a-t-il encore affirmé. Interrogé par l'AFP, le ministère des Finances a affirmé vendredi être vigilant et suivre de près la situation, au moment où de nombreux secteurs pourraient de nouveau appeler à l'aide.
Le télétravail est vivement conseillé par le gouvernement, mais 44% des actifs en emploi affirment ne pas pouvoir y avoir recours, selon un sondage réalisé mi-décembre par le cabinet Harris pour le ministère du Travail. C'est par nature le cas du spectacle vivant, où une flambée des cas a contraint à des annulations au Moulin Rouge, au Crazy Horse et au Théâtre Mogador à Paris, dans le sillage de Broadway, ce qui ravive le souvenir de la première vague du printemps 2020.
Avec AFP
latribune.fr6 mn
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