La hausse du droit commun sur l’importation des produits finis de 30% à 40%, proposée dans le projet de loi de finances rectificative, vise à « renforcer la protection de la production nationale pour accompagner les efforts entrepris en matière d’appui aux entreprises marocaines en difficulté. De même, la pression exercée sur les réserves nationales de change, impose de prendre des mesures pour encourager la substitution des importations par la production locale » est-il mentionné dans la note de présentation du PLFR.
L’assiette taxable (positions tarifaires) concernée par le taux de 30% est de 54,6 MMDH sur la base de l’année 2019. Ce montant inclut les produits qui paient effectivement ce taux (près de 14 milliards de DH), ainsi que ceux qui bénéficient de franchise ou d’accords de libre-échange et dont le taux de droit de douane ne peut être rétabli à 30% qu’en cas de renégociation des ALE ou d’application de mesures de protection.
Ce ne sont pas moins de 125 produits qui seront touchés par cette hausse, sauf amendement de dernière minute. Plusieurs secteurs sont concernés parmi lesquels :
– Produits alimentaires : Café, Cacao, épices, jus de fruits et de légumes, pastèques et melon, eaux minérales et boissons non alcooliques, Huile de tournesol brute ou raffinée, Autres huiles végétales brutes ou raffinées, Conserves de fruits et confitures, préparations à base de sucre, sucre brut ou raffiné , Pâtisseries et préparations à base de céréales, Fruits frais ou secs, congelés ou en saumure
– Articles de textile et cuir : Vêtements confectionnés et articles de bonneterie, Chaussures, Couvertures, linge et autres articles textiles confectionnés, Tissus spéciaux, velours, dentelles et broderies, Tissus imprégnés ou enduits de matières diverses (consommation), Parties de chaussures , Sacs, malles et ouvrages divers en cuir,
– Articles domestiques : Réfrigérateurs, lave-vaisselle et autres articles domestiques, Vaisselle et objets céramiques divers, quincaillerie de ménage et articles d’économie domestique, Cuisinières et appareils de chauffage
– Des matériaux : Fils, câbles et autres conducteurs isolés pour l’électricité, Accessoires de tuyauterie et construction métallique, Peintures, vernis et mastics, Tubes et tuyaux en cuivre, Caoutchouc et ouvrages en caoutchouc, Marbres; granit; gypse et autres pierres, Lièges et ouvrages divers en liège, Fils, barres et profilés en cuivre, Ouvrages en pierres, plâtre, ciment, ou en matières similaires, Produits céramiques
– Des équipements industriels : Moteurs à pistons; autres moteurs et leurs parties, Balais, brosses et autres articles similaires , Appareils pour la production du froid à usage industriel, Articles de robinetterie et organes similaires, Ouvrages divers en bois en sparterie ou en vannerie
– Produits sanitaires : Médicaments et autres produits pharmaceutiques, Meubles; mobilier médico-chirurgical; articles de literie et appareils d’éclairage, Instruments et appareils médico-chirurgicaux,…
– Autres produits : Tabacs, Sièges, meubles, matelas et articles d’éclairage, Voitures utilitaires, Bandages et pneumatiques, Parties et pièces pour voitures et véhicules de tourisme, Ouvrages divers en verre, Ouvrages divers en fer ou en acier, Articles divers en caoutchouc, Articles d’écriture et de bureau, Papiers et cartons; ouvrages divers en papiers et cartons ; Papiers finis et ouvrages en papier, Tapis et revêtements de sol, Livres et imprimés divers, Peignes à coiffer, épingles à cheveux et autres articles similaires pour la coiffure, Encre d’imprimerie ou d’écriture (demi-produits), Jouets, jeux et articles de divertissement ou de sport,…
La logique sur laquelle l’Etat se base pour augmenter l’imposition de ces produits, c’est qu’une partie de ces produits ne sont pas essentiels et sont tout de même importés ce qui grève la balance commerciale et de paiement du pays.
Cependant, dans le lot il existe aussi des produits importants dont a besoin le pays. Devra-t-on les payer plus cher ? Ce n’est pas forcément le cas. Car le gouvernement travaille en parallèle sur une politique visant à installer des industries fabriquant ces produits desquels le pays ne peut s’en passer.
C’est la stratégie menée par le ministre de l’industrie et du commerce Moulay Hafid Elalamy et dont il révèle les contours par bribes lors de ses passages au parlement. En juin dernier le ministre avait déclaré :« J’ai un problème avec ce que nous importons. J’ai découvert par exemple que nous importons des lits d’hôpitaux, des tables d’écoliers…, ce n’est pas normal. Cela fait longtemps que j’appelle les entrepreneurs marocains à s’investir dans l’industrie, que les opportunités ne manquaient pas. Mais il n’y avait pas du répondant. Là, j’ai décidé de changer de logiciel. J’ai donné des instructions à mes équipes de lister tous les produits que nous importons, et voir ce qu’on peut limiter, voire arrêter, en le substituant par une production locale ».
Des lits d’hôpitaux ou des tables d’écoliers que nous ne fabriquons pas, ce ne sont là que des exemples parmi tant d’autres. Les balais, les cartables d’écoliers, le concentré d’orange (matière indispensable dans la production de jus) ou les boites de conserves pour le poisson sont tous aujourd’hui importés.
Pour mettre fin à ces aberrations, la recette de MHE est de mettre en place une banque de projets dans les diverses niches qui seront détectées, avec des business plan bien ficelés et un accompagnement des entrepreneurs marocains dans le montage de leurs projets et dans les démarches pour obtenir les financements nécessaires à leurs projets.
« Nous importons 43 MMDH de produits qui peuvent être fabriqués au Maroc pendant les prochaines années. Pour près de 22 MMDH, nous avons des business plan prêts et nous savons précisément ce qu’il faut faire pour ne plus les importer. Nous travaillerons sur cela dans les prochaines semaines et nous allons lancer le projet et l’adresser aux jeunes marocains et aux investisseurs », expliquait le ministre lors de son passage au parlement le lundi 6 juillet dernier.
A en croire le ministre, la banque de projets est quasiment finalisée. Pour ce qui est du financement, le programme a déjà été mis en place via Maroc PME, il s’agit du programme Tatwir. C’est une offre sur mesure permettant l’accompagnement de bout en bout pour développer les investissements dans les secteurs industriels prioritaires, encourager les investissements dans les produits non encore ou faiblement industrialisés au Maroc, et promouvoir l’accélération du développement des TPME à fort potentiel (scale-up) ». « Cette offre intègre à la fois l’appui à l’investissement et le conseil et l’assistance technique ».
En terme de financement, le programme Tatwir offre un appui au soutien à l’investissement de 30% du programme d’investissement augmenté d’une avance remboursable de 5% pour le financement des dépenses d’exploitation ; Une prise en charge de 80% du coût d’expertise technique et conseil ; et une prise en charge de 50% des dépenses relatives aux projets de créativité et co-développement plafonné à 5MDH /projet.
Les appels à projet dans ce sens seront bientôt lancés.